L’activité des urgences s’est avérée très chargée ces derniers mois pour l’Ensemble Hospitalier de La Côte (EHC), à Morges. La triple épidémie de grippe, de covid et de bronchiolite, ajoutée à l’afflux de patients âgés et souffrant de comorbidités, a mis le personnel soignant à rude épreuve. Les urgences de l’hôpital y accueillent entre 60 et 70 patients par jour, celle de la Permanence des Halles entre 80 et 90.

Même constat du côté du Groupement Hospitalier de l’Ouest Lémanique (GHOL), à Nyon, qui a enregistré 33’500 passages aux urgences en 2022, soit près de 12% d’augmentation par rapport à l’année précédente. «La situation des urgences dans la région de La Côte est tendue, comme partout ailleurs, car l’affluence ne cesse de croître», confirme Etienne Caloz, directeur du GHOL.

Pénurie de médecins et crise des lits

Plusieurs facteurs expliquent la péjoration de la situation. En premier lieu, la pénurie de médecins généralistes rend l’accès aux soins de premier recours laborieux. «La population augmente chaque année. En parallèle, un nombre croissant de médecins part à la retraite. De plus en plus de patients se retrouvent alors sans médecin traitant. Se soigner aux urgences devient leur seule alternative», explique Yves Dubey, médecin responsable de la Permanence des Halles, à Morges.

Morges, mardi 17 janvier 2023 Reportage à la permanence des Halles de Morges de l’Ensemble Hospitalier de la Côte EHC
 © Sigfredo Haro

Une patiente se fait examiner à la Permanence des Halles, à Morges. Cette dernière prend en charge entre 80 et 90 patients par jour. Photo: Sigfredo Haro

Un autre problème vient s’ajouter: celui de la crise des lits. «Dans plus de 25% des cas, les patients qui arrivent aux urgences de l’hôpital requièrent une hospitalisation, à savoir passer au moins une nuit dans un lit d’hôpital. Or, parfois, il n’y a plus de places disponibles dans les étages», affirme Sébastien Vix, infirmier-chef des urgences de l’hôpital de Morges.

Notre taux d’occupation est toujours à son maximum.

Etienne Caloz, directeur Groupement Hospitalier de l’Ouest Lémanique (GHOL)

Se crée alors un bouchon aux urgences où les patients doivent attendre pendant de longues heures et, par répercussion, occupent des lits qui devraient normalement rester libres pour les urgences. «Dans ce cas, le turnover au sein de l’hôpital s’avère complexe», poursuit Sébastien Vix.

Le GHOL subit le même problème. Sur les 135 lits disponibles dans l’hôpital de Nyon, 20 sont occupés de manière continue par des patients en attente d’une place dans un EMS ou dans un centre de réadaptation. «Notre taux d’occupation est toujours à son maximum, alors qu’il devrait se situer à 85%. Il devient alors difficile d’accueillir de nouveaux patients qui viennent des urgences», indique Etienne Caloz.

Aurélie Meynet, directrice opérationnelle à la Clinique de Genolier, voit un troisième problème au fonctionnement des urgences: le recrutement du personnel de santé. «Nous rencontrons des difficultés à trouver des médecins et des infirmières pour les urgences, mais également des soignants spécialistes, que cela soit en radiologie ou en chirurgie», indique-t-elle.

Genolier, jeudi 12 janvier 2023 Reportage aux Urgences à la Clinique de Genolier. Portrait d’Aurélie Meynet, directrice opérationnelle de la Clinique
 © Sigfredo Haro

Pour Aurélie Meynet, directrice opérationnelle de la Clinique de Genolier, le recrutement du personnel de santé est problématique pour les urgences, mais également pour les autres services de l’hôpital. Photo: Sigfredo Haro

Bobologie aux urgences?

L’engorgement des urgences est-il dû à un phénomène de «bobologie»? «Non, les gens qui se présentent aux urgences le font parce qu’ils souffrent. Ils ne viennent pas pour une bagatelle», affirme Etienne Caloz. «Pour les patients, il ne s’agit jamais de bobologie. C’est un jugement de valeur subjectif», ajoute Aurélie Meynet. Elle reconnaît toutefois que certaines interventions pourraient être soignées dans un cabinet de médecin de famille ou en permanence plutôt qu’aux urgences.

Le temps d’attente aux urgences ne doit pas décourager les gens à venir se faire soigner.

Sébastien Vix, infirmier-chef des urgences de l’hôpital de Morges.

Il n’y a donc pas moyen d’influer sur la demande. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une volonté de la part des hôpitaux. «Le temps d’attente aux urgences ne doit pas décourager les gens à venir se faire soigner. Si leur cas nécessite un traitement rapide, nous sommes en capacité de le prodiguer», assure Sébastien Vix.

Des solutions voient le jour

Face à la demande croissante, le GHOL a choisi d’ouvrir dix lits supplémentaires à ses frais. Dans le cas des hôpitaux publics, le nombre de lits est défini par le Canton de Vaud. Ce dernier pourvoit 55% des frais. Les 45% restants sont pris en charge par l’assureur. Ces dix lits représentent une perte financière pour l’hôpital. «Nous n’avons pas le choix, il y a trop de monde», relève le directeur.

Le GHOL est également en train de mettre en place une filière pédiatrique et une filière rapide aux urgences. La première garantira des compétences adaptées aux jeunes patients 24 heures sur 24. Au sein de la seconde, du personnel soignant se consacrera aux traitements qui peuvent être réalisés rapidement, tels que des points de suture, afin de fluidifier le flux de patients. «Nous envisageons l’ouverture de cette nouvelle structure dès le mois de mai, mais, en attendant, nous devons engager du personnel spécialisé, ce qui n’est pas chose aisée», affirme Etienne Caloz.

La pharmacie, une alternative aux urgences
Migraines, allergies saisonnières, maladies aiguës du système respiratoire ou de l’appareil digestif, ou encore troubles de l’érection, ces problèmes de santé peuvent être traités directement par des pharmaciens et pharmaciennes. Selon les symptômes, ces derniers ont la possibilité de proposer un traitement ou de remettre, après conseil approfondi et sans prescription médicale, des médicaments soumis à ordonnance.

Pour Morges, la création, en septembre 2021, de la Permanence des Halles, à côté de la gare, doit décharger les urgences hospitalières où les temps d’attente sont plus longs. Aux Halles, seules les urgences de degrés trois et quatre, où le pronostic vital n’est pas engagé et qui se terminent par un retour à domicile probable dans la journée, sont admises. Cela concerne, par exemple, les petites plaies, les fractures, les angines ou encore les cystites. Les urgences de l’hôpital peuvent alors se consacrer essentiellement aux urgences vitales, de degrés un et deux.

Des permanences avec moins d’attente

A la Permanence des Halles, l’attente va de quinze minutes à une heure. Les patients semblent satisfaits des soins qui leur sont administrés. «Nous avons des retours positifs. Les patients sont pris en charge, écoutés. Un diagnostic est posé et ils repartent, dans la majeure partie des cas, avec une ordonnance», indique Yves Dubey.

Nous sommes encore en capacité d’absorber le flux.

Manon Vallet, infirmière responsable du service des urgences de la Clinique de Genolier

Même constat du côté de la Clinique de Genolier qui a ouvert, en septembre 2021, un service d’urgences ambulatoires. «Bien que nous constatons une augmentation du nombre de patients qui vient aux urgences, nous sommes encore en capacité d’absorber le flux», indique Manon Vallet, infirmière responsable du service. L’attente y est généralement de moins d’une heure.

La population suisse est vieillissante et en constante augmentation. Même si des changements profonds s’opèrent dès à présent, en formant plus de médecins généralistes par exemple, les effets positifs de ces mesures se feront ressentir sur le long terme. Favoriser le développement des urgences ambulatoires reste, pour l’heure, la meilleure alternative face aux urgences sous tension.

Un centre d’urgences de médecins généralistes: la solution face à la saturation
Dans le Haut-Valais, l’hôpital de Viège a créé un centre d’urgences en son sein, géré par des médecins généralistes de la région. Ces derniers assurent le tri des patients. Ils gardent ceux qu’ils peuvent soigner directement et envoient les autres aux urgences hospitalières. «Avec ce système, nous faisons fonctionner le réseau et les collaborations. Pour désengorger les urgences, une des premières choses à faire est de se montrer moins hospitalo-centré», affirme Etienne Caloz.

Loup: un parasite influencerait le comportement du chef de meute

Un loup infecté par le parasite Toxoplasma gondii aurait une plus grande propension à prendre des risques, selon une étude américaine. Il aurait ainsi plus de chances de s’imposer comme chef de meute.