Le 30 avril 2022 restera à jamais marqué d’une pierre blanche pour Daniel Perler. En atteignant, ce jour-là, le point culminant du Solimana, le Glandois a mis un point final à l’incroyable défi qu’il s’était lancé dix ans auparavant: gravir 60 sommets de 6000 m de la cordillère des Andes avant de passer le cap des 70 ans. Il y est parvenu à l’âge de 69 ans… et 359 jours!

Après deux années grandement perturbées par le Covid, le postier retraité a toutefois dû s’atteler pour boucler son challenge dans les temps. Avant de s’envoler pour le Pérou le 14 avril dernier, il lui restait encore cinq «géants» à conquérir…

Cette dernière volée d’ascension, le Glandois l’a entamée le 16 avril avec le Chachani. Photo: DR

Une dernière ascension à la hauteur du défi

«Je suis arrivé le 15. Le 16, j’entamais l’ascension du Chachani», raconte Daniel Perler, qui a ensuite enchaîné avec l’Ampato, le Hualca Hualca, le Coropuna et le Solimana. «Ils étaient relativement rapprochés. Enfin, à l’échelle de l’Amérique du Sud, précise-t-il. Mais à raison d’un sommet tous les trois jours, c’était abordable.»

Comme pour graver plus profondément encore dans le marbre l’exploit qu’il était sur le point d’accomplir, la dernière étape de son épopée, extrêmement technique et dotée d’une pente sommitale impressionnante, s’est révélée plus ardue que prévu…

La partie finale du Solimana, un dernier effort pour finaliser l’exploit. Photo: DR

«Je ne m’y attendais pas trop, confie le désormais septuagénaire. Sur le sommet précédent, Angel, mon guide, m’a demandé si j’avais l’habitude de monter avec des piolets. Je lui ai répondu que je l’avais eu fait et que sur 20 m, ça irait. Quand il m’a dit que ce serait 4x60m… Je me suis dit: bon, ben pas le choix, il va falloir y aller!»

Dix ans dans le rétro

Son 60e travail d’Hercule accompli, Daniel Perler, a ressenti une grande joie. Mais celle-ci a été précédée par… du soulagement: «Ces cinq derniers, je ne pouvais pas me permettre de les louper en raison du peu de temps qu’il me restait avant mon anniversaire. Il y avait aussi pas mal d’inconnues. Je ne connaissais ni la région, ni les montagnes, ni l’agence, ni le guide, ni le porteur. Mais au final, les étoiles se sont alignées et tout s’est très bien passé.»

Lors de ses cinq dernières ascensions, Daniel Perler a été parfaitement assisté par Angel, son guide (g.) et Elvis, son porteur (d.). Photo: DR

Revenu en Suisse le 2 mai, Daniel Perler a esquissé un retour sur ces dix dernières années. Premier constat: il ne les a pas vues passer. «J’ai l’impression qu’hier je vendais des t-shirts à la poste de Prangins pour financer un peu mon premier voyage», lâche-t-il, sourire aux lèvres.

«Ce projet, c’est aussi une épouse qui jamais ne m’a dit: «Non, n’y va pas», une famille qui m’a accordé son appui et des gens qui m’ont soutenu, notamment financièrement», ajoute-t-il, reconnaissant. «C’est également, pêle-mêle, cinq pays parcourus – l’Argentine, le Chili, la Bolivie, le Pérou… et le Népal, où j’ai grimpé deux «6000» sur les 60 quand le Covid a rendu impossible les voyages en Amérique du Sud -, des rencontres, des partages uniques. Et de grands moments de solitude. Le 99% du temps, j’étais seul. Ce qui m’a permis de beaucoup penser. C’était un peu une vie de moine, en fait», glisse-t-il, l’œil rieur, avant d’évoquer la somme d’efforts physiques et psychologiques produits durant cette décennie.

Un inusable émerveillement

«Et dire qu’à l’origine je voulais effectuer tout ça en six mois, s’amuse le Vaudois. Mais avec le recul, je suis heureux de l’avoir fait en presque dix ans. Ça m’a permis à chaque fois de repartir avec de la motivation et surtout d’avoir eu du temps pour assimiler ce que j’avais fait. De m’en imprégner. En enchaînant tout sur une courte durée, la satisfaction aurait été différente.»

Aujourd’hui, après avoir successivement conquis les Seven Summits – les plus hauts sommets de chaque continent – puis mené à bon terme cette aventure des 60 sommets, Daniel Perler estime avoir accompli son parcours. «Je suis comblé. Le temps des challenges est désormais révolu. Mais j’aurai toujours la montagne chevillée au corps. Je vais continuer à la côtoyer, retourner dans des endroits que je connais déjà, comme le Jura. J’y prendrai toujours du plaisir car je reste toujours émerveillé. Je ne m’en lasserai jamais.» Parole de montagnard.

Une évolution climatique «violente»
Quarante ans après sa première ascension en Amérique du Sud, Daniel Perler a pu constater, lors de son dernier périple, les derniers ravages du dérèglement climatique.
«C’est violent. Mon guide m’a fait part de son étonnement quant à la vitesse à laquelle ça fond d’une année à l’autre Les pentes de neige et de glace ont perdu des centaines de mètres. Du coup, les cheminements ont été différents de ceux qui étaient encore valables il y a encore deux ans. C’est inimaginable. Et on parle de 5000 m – 5500 m d’altitude. Cela va poser des problèmes d’alimentation au niveau de l’eau, car que ce soit dans l’Himalaya ou dans les Andes, ce sont de grandes sources hydriques qui diminuent, peu à peu…»

60 sommets de 6000m: Daniel Perler a réussi son défi!

Le Glandois s’était fixé le challenge de gravir 60 sommets de 6000 m avant d’avoir 70 ans. Il y est parvenu le 30 avril dernier, six jours avant la date fatidique.