Assurément, le bâtiment situé au numéro 9 de la rue des Marchandises, dans le prolongement de celui occupé par l’Elastique citrique, ne fait pas partie des marqueurs qui façonnent l’identité urbanistique de la ville de Nyon.

Construit dans les années 1930 et acheté par la commune en 1977, le bâtiment ECA 1484 de son petit nom est reconnaissable à sa rangée de garages au rez-de-chaussée et son logement à l’étage.

Devant la vétusté de l’ensemble, les occupants du 1er ont été relogés et les baux des garages résiliés.

Dans l’arène du Conseil

Pour la suite, les plans de la Municipalité étaient simples: raser le tout et aménager quatorze places de stationnement temporaires en attendant le développement de l’entier du secteur.

Ce scénario a été mis à mal, lundi soir, lors du Conseil communal de Nyon où un préavis pour la démolition du bâtiment était soumis au vote des élus nyonnais.

Avec un rapport de majorité demandant le maintien de la bâtisse et un de minorité validant la vision municipale, un débat nourri était attendu. Et cela n’a pas manqué.

Conserver pour valoriser

La discussion s’est immédiatement muée en passe d’arme entre la gauche et la droite nyonnaise. Les premiers, s’appuyant sur les attentes des habitants du voisinage, ont proposé de valoriser l’existant en le mettant, par exemple, à disposition du tissu associatif.

Il est temps de changer de philosophie, de réparer, d’entretenir et de valoriser plutôt que de détruire.

Alexander Federau, chef du groupe Les Vert.e.s

«Le bâtiment a encore un potentiel d’utilisation, a avancé Alexander Federau, chef du groupe Les Vert.e.s. Il est temps de changer de philosophie, de réparer, d’entretenir et de valoriser plutôt que de détruire», a encore plaidé l’élu.

Un parallèle a été fait avec le parking du Martinet où l’ancienne usine à boulons Kocher avait également été démolie pour faire place à une zone de stationnement, devenant ainsi, selon Alexander Federau, «Le lieu le plus laid de la ville.»

Pour l’anecdote et pour renforcer la comparaison, le conseiller socialiste Claude Farine a relevé que l’architecte de feu l’usine Kocher s’avérait être le même que celui du bâtiment de la rue des Marchandises, un certain Louis Genoud.

Raser pour économiser

A droite, la perception de la problématique s’est révélée bien différente. «Conserver le bâtiment serait synonyme de coûts prohibitifs et ce pour une occupation temporaire», a argumenté le chef du groupe du Parti indépendant nyonnais (PIN), Jacky Colomb. Cette démolition permettrait, toujours selon l’élu, de faire naître une «ouverture intéressante dans la géographie du quartier.»

De quoi imaginer une place de jeu, de rencontre et pourquoi pas des Portakabins susceptibles d’accueillir la vie associative.

Reste un élément sur lequel la gauche et la droite sont tombées d’accord: la mise en place de 14 places de parcs supplémentaires est à exclure de l’équation.

Les Vert’libéraux en arbitres

«Pas besoin d’un long plaidoyer, les positions sont limpides, a analysé Claude Uldry, municipal chargé du dossier. Mais que les choses soient claires: un nouveau projet impliquera un changement d’affectation, ce qui impliquera une mise à l’enquête et une mise aux normes énergétiques et sécuritaires», a prévenu le membre de l’exécutif.

Cette démolition permettrait de faire naître une ouverture intéressante dans la géographie du quartier.

Jacky Colomb, chef du groupe du Parti Indépendant nyonnais

Avec pour conséquence une facture probablement plus élevée que celle d’une démolition estimée à 318 000 francs.

Un ultime argument qui n’aura pas suffi à convaincre les quatre élus Vert’libéraux qui ont fait pencher la balance du côté de la préservation du bâtiment des Marchandises. Le préavis municipal a été rejeté par 44 non, contre 40 oui et deux abstentions.

L’ombre d’un conflit d’intérêts?
Mentionnée à plusieurs reprises dans le rapport de majorité demandant la sauvegarde du bâtiment, l’association ECUM Urbaine semble avoir activement participé aux réflexions entourant la nouvelle affectation des lieux. Problème: les coprésidents de ladite association, Gianluca Solimine et Raffaele Giannattasio, sont également conseillers communaux encartés chez Les Vert.e.s. De quoi y voir un conflit d’intérêts? Prenant la parole avant le débat sur le préavis, Gianluca Solimine a tenu à clarifier certains éléments présentés dans le rapport de majorité.
«Notre association n’a pas la main mise sur le bâtiment des Marchandises, nous avons simplement piloté, en octobre dernier, un atelier d’intelligence collective afin d’explorer différentes solutions pour cet emplacement.» Les deux hommes se sont renseignés auprès du président du Conseil afin de savoir s’ils devaient se récuser, mais ECUM Urbaine défendant un intérêt collectif et non-personnel, la récusation n’a pas été jugée nécessaire par Marco Carenza.

Nyon: le bâtiment de la cour des Marchandises sauve sa peau in extremis

La Municipalité voulait le raser, mais Les Vert.e.s, le PS et les Vert’libéraux avaient d’autres projets pour le bâtiment situé au numéro 9 de la rue des Marchandises.